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La Presse ou le déclin d'un quatrème pouvoir
8 mars 2010

La puissance de la Presse : Autopsie d'un quatriéme pouvoir

Le pouvoir : une notion complexe


 
 

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e pouvoir a aujourd’hui plusieurs sens. Venant du verbe homonyme, qui signifie «avoir la possibilité, la capacité de », le pouvoir désigne, au sens interactionniste, l’aptitude d’un agent donné d’obtenir d’un autre agent qu’il fasse une certaine action, consciemment comme inconsciemment. En outre, il désigne, au sens institutionnaliste, les gouvernants tandis qu’au sens général, le pouvoir représente la faculté d’agir propre à un être humain. Burke, homme politique et philosophe irlandais du XVIIIème siècle, parle dès 1787 de la Presse comme d’un quatrième pouvoir. Il est repris près de 46 ans plus tard par Alexis de Tocqueville qui, dans son œuvre majeure intitulée De la démocratie en Amérique, dresse une nouvelle classification du pouvoir où il distingue le pouvoir central (exécutif, législatif et judiciaire), le pouvoir local (les pouvoirs fédérés), le pouvoir associatif (les lobbies) de la presse écrite. C’est en effet un contre-pouvoir par excellence, dans la mesure où elle « n’a d’autre d’autre pouvoir que celui d’arrêter les pouvoirs » (Gauchet) et qui permet en outre d’informer les individus tout en forgeant une opinion publique. Cependant, son influence est désormais à relativiser, car la presse n’est plus perçue de la même manière et semble s’être domestiquée.

 La Presse : un acteur politique

 
 

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a Presse est l’un des pouvoirs principaux du peuple : elle le représente et assure par ailleurs une fonction politique importante, étant donné qu’elle est un lien direct entre le citoyen et le politique ; et même un pouvoir contre ce dernier. En effet, en dehors du cadre institutionnel, elle possède le rôle d’arbitre, ce qui lui confère de plus une certaine légitimité auprès du politique. Ainsi, la presse est un contre-pouvoir puissant dans le cadre de la théorie de la séparation des pouvoirs de l’écrivain et philosophe Montesquieu, dans lequel chaque branche doit exercer un contrôle sur les autres afin de maintenir l’équilibre mis en place par la constitution. Le rôle de la presse donc en quelque sorte celui d’un gardien du jeu démocratique, surveillant en quelques sortes nos gouvernants. De plus, la Presse joue un rôle fondamental pour l’opinion publique, base de la démocratie. Grâce à cela, les gouvernants sont obligés de composer avec ; de prendre en compte ses préoccupations et d’adapter leur comportement en fonctions de celles-ci. La presse a donc le pouvoir de forger le jugement public dans le cadre d’un régime représentatif : il faut par conséquent qu’elle soit autonome du pouvoir politique, mais en même temps lié à ce dernier pour pouvoir jouer son rôle de contre-poids, un rôle qu’il joua parfaitement à plusieurs reprises. L’Histoire nous fournit à cet égard un certain nombre d’exemples, comme son importance dans l’affaire Dreyfus, qui n’est devenue une « affaire » que grâce à la publication par Zola dans l’Aurore de son célèbre « J’accuse » dans une lettre ouverte au Président de la République Felix Faure le 13 janvier 1898 (voir fin d’édition).

La Presse, influence de la société

 
 

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a Presse n’a pas seulement un pouvoir du point de vue politique: elle conserve aussi un pouvoir d’influence sur le comportement des individus, grâce notamment à une diffusion d’informations spécialisées et une certaine attraction auprès de ses lecteurs.

Le Sociologue Luc Boltanski, condisciple de Pierre Bourdieu, démontre tout d’abord que la presse possède une capacité élevée de retenir l’attention, même si cela n’a aucune conséquence directe sur le plan de l’action, principalement en jouant sur la sensibilité. Il semblerait ainsi que le traitement de la souffrance soit le principal point d’accroche par du lecteur la presse.

 De plus, la presse peut nous influencer indirectement, en sélectionnant l’information, et directement, en l’adaptant à son point de vue. Ce pouvoir de nous informer comme elle le veut a des conséquences sur notre comportement : plusieurs études ont été faites démontrant la capacité de la presse à cristalliser des élections. De plus, les journaux engagés peuvent conserver une part d’électorat en adoptant des positions politiques différentes voire même totalement opposées. Par exemple, une enquête menée par le courrier international anglais The Observer à tendance libéral a montré que ses électeurs étaient composés de 15% de libéraux contre plus de 57% de conservateurs et 25% de travaillistes ; ce qui démontre une volonté lors d’élection d’éluder de la part d’individus des points de vues qui ne correspondent pas aux leurs. Cette étude montre aussi que les discours partisans exercent une influence uniquement sur un public déjà conquis.

 Cependant, il est aussi démontré que la presse possède moins d’influence que la pression exercée sur les individus par les « groupes primaires » (famille, proche, amis, etc…) mais aussi que notre capacité à être influencé dépend de notre confiance en soi : une forte estime de soi renforce notre résistance vis-à-vis de la presse alors qu’une période d’incertitude et de doute peut être à l’origine d’une forte dépendance vis-à-vis de la presse. C’est en tout cas la thèse du « other directed » du sociologue américain Riesman.

Un instrument du pouvoir économique et politique


 
 

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’une part, la presse semble être aujourd’hui domestiquée, principalement par le système économique et politique. D’un point de vue économique, les oligopoles mondiaux de l’information et de la communication sont la propriété  de puissants groupes industriels, bancaires et financiers. Ils deviennent ainsi les principaux relais des intérêts de ces multinationales. Par exemple, Le Figaro  appartient depuis 2004 à Serge Dassault, également propriétaire de Dassault Aviation. Ainsi, ce dernier aurait, selon le quotidien Le Monde, exercé une pression sur la rédaction du plus vieux journal de France. C’est en tout cas ce dont se plaignent des journalistes du Figaro. Serge Halimi, auteur des Nouveaux chiens de garde, dénonce également le pouvoir des grands patrons de placer ou déplacer les journalistes selon leur volonté, les obligeant de plus à rester dans un cadre de pensée qui leur correspond.

 Par ailleurs, la presse semble souffrir d’une influence politique. Ainsi, dans son ouvrage paru en 2003 et intitulé Ce que les journalistes politiques ne racontent jamais, Daniel Carton ancien journaliste au Monde et au Nouvel Observateur dénonce les relations entre politiques et journalistes, parfois plus qu’amicales. Par exemple, en 1997, Michel Rocard qui connaissait la direction du journal a demandé à l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur de démentir une information publiée dans ses colonnes alors que cette dernière était pourtant vraie.



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